Depuis quelques temps, Maya l’abeille crée un buzz grandissant au niveau national et dans la région lyonnaise. Si l’on revient trois ans en arrière, il y a notamment eu la pose médiatisée de ruches sur les terrains de l’aéroport de « Lyon-Saint-Exupéry » pour surveiller la qualité de l'air. En effet, ce dernier autorise et encourage le vol d’autres objets volants identifiés que les avions, celui des abeilles… à une altitude beaucoup moins élevée, heureusement pour elles. Parcourant l’espace aérien constitué de pistes d’atterrissage et surtout des prairies fleuries qui les bordent, elles sont proclamées sentinelles de l’environnement d’un milieu soumis à la pollution liée à l’industrie du transport aérien (émissions de gaz des avions, flux de circulation induits par le trafic aéroportuaire).
Plus récemment, le Grand Lyon fait sensation en installant des ruches sur les toits de son siège de la Part-Dieu. Non, il n’existe toujours pas de concours de « gestionnaire de ruches » dans la fonction publique [des candidats ? J] : les résidentes ailées butinent sous la responsabilité d’un apiculteur professionnel qui peut se vanter de créer un miel « made in Lyon » [à quand une vrai-fausse marque du style Grand O ?]. Toutefois, si le grand public prend conscience, grâce à ces initiatives, de l’existence de l’abeille en milieu urbain, celles-ci sont tournées vers l’abeille de ruche alors que l’abeille sauvage est encore davantage en danger.
Or, depuis plusieurs mois, les abeilles sauvages sont les stars d’un vrai projet environnemental, de grande envergure (pluriannuel, validé et co-financé par l’Europe et les collectivités territoriales concernées au niveau local) : le projet Life + « Urbanbees ». Il n’en reste pas moins expérimental puisque l’étude sera généralisée (ou non) aux autres pays européens en fonction des résultats de ce programme dont Lyon est le terrain d’expérience unique. En quoi consiste Urbanbees ? Et bien à sauver Willy, pas l’orque mais l’abeille sauvage.
Alors, c’est nouveau, il y a des abeilles sauvages et des abeilles apprivoisées ?? Presque. Quand on pense aux abeilles, on pense [avec le ventre… ] aux ouvrières des ruches, magiciennes détentrices des secrets du miel et de la gelée royale. En fait, elles ne constituent que 1% des espèces d’abeilles, les 99% qui restent étant constituées de différentes abeilles sauvages, auxquelles appartiennent par exemple les bourdons. Celles-ci, contrairement aux espèces mellifères, ne vivent pas en collectivité dans des ruches mais de manière isolée. Si l’abeille de ruche voit son toit assuré par l’apiculteur qui met tout en œuvre pour que les essaims s’installent et restent, l’abeille sauvage ne doit sa survie qu’à elle-même. Or, toutes les abeilles sans distinction sont menacées de mort en raison essentiellement de la pollution phytosanitaires (traitements chimiques) et de la modification des milieux naturels par l’homme (ex : élimination des bosquets entre les champs cultivés). Conclusion paradoxale et contraire aux idées reçues, à l’heure actuelle, les villes sont plus saines pour l’abeille ?!!
Mais au fait, pourquoi sauver les abeilles ? Parce le destin de la flore, clé de voûte des écosystèmes émergeant du sol, leur est intimement lié. En bref, cet insecte est l’un des symboles forts de la biodiversité, à double titre : en tant qu’espèce menacée de disparition, et en tant que vecteur de la survie de la flore de la planète via la pollinisation. Cela fait grandiloquent mais le sujet est sérieux. Sans les abeilles, moins de fleurs fécondées donc moins de plantes, de fruits, de légumes, … Se sont les industriels qui vont être contents, du moins si l’Homme résiste à un tel cataclysme écologique, on mangera 100% synthétique !!
Heureusement, l’Europe et les pouvoirs publics français commencent à être sensibilisés aux problèmes de biodiversité et à agir, d’où la naissance du programme Urbanbees. Heureusement aussi que des associations portent ces projets et apportent leur expertise technique et scientifique. Concernant cette opération, le pilotage se fait à deux : l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) [merci à la recherche ! ] et Arthropologia, association naturaliste rhodanienne créée en 2001, rodée à l’étude et la sauvegarde de la nature. Hugues Mouret, directeur d’Arthropologia, explique au Progrès l’origine et les contours du projet Urbanbees (Des abeilles au cœur de la ville pour préserver l’espèce, 31 mai 2010). L’association, qui réfléchit au problème de la disparition des abeilles depuis 2006, remporte l’appel à projets "Life+Biodiversité" en 2009 avec l’objectif de tester une méthode pour enrayer la disparition des populations d’abeilles, une première en France. Le chantier à mener en 5 ans (2010-2014) est vaste : réaliser un état des lieux des populations, installer une vingtaine d’hôtels à abeilles dans le Grand Lyon, étudier leurs impacts, communiquer et généraliser la méthode si elle s’avère fructueuse. Pour cela, Urbanbees bénéficie d’un budget de 2,17 millions d’euros et du soutien financier de l’Union Européenne, du ministère de l’Ecologie, de la région Rhône-Alpes, du Grand Lyon et même d’une entreprise, la société Botanic.
Le projet avance à grand pas et la construction des havres de paix destinés aux abeilles est en cours : vous pouvez déjà visualiser les photos suivantes. Je raconterai l’épopée d’Urbanbees à Lyon dans un futur billet. En cas d’impatience, et surtout si vous voulez participer à des journées écocitoyennes pour donner un coup de main dans la bonne humeur, contactez Arthropologia.